lundi, février 13, 2006

George Soros, les contradictions d’un milliardaire philanthrope

George Soros est un sacré personnage. Philanthrope surmédiatisé, spéculateur controversé, politicien à ses heures, il incarne ce que nous redoutons : le pouvoir et l’assurance.

Né en 1930 à Budapest, il fuit la Hongrie communiste après avoir échappé aux rafles nazies et immigre en Angleterre. Il fait ses études à la London School of Economics. En 1956, il quitte l’Angleterre pour les Etats-Unis. Et il adopte les caractéristiques des différentes cultures qu’il a traversées. Des Etats-Unis, il a pris le libéralisme à outrance : en 1992, il spécule contre la livre sterling et gagne un milliard de dollars. Cinq ans plus tard, il remet ça en attaquant la monnaie thaïlandaise. Il profite de la volatilité des capitaux permise par le libéralisme pour faire sa fortune.

De l’Europe, il prend la diplomatie paradoxale. A Davos, l’an dernier, il était l’un des seuls défenseurs de la taxe Chirac. Même s’il juge que la mise en place d’une taxe sur les capitaux spéculatifs pour lutter contre la pauvreté est irréalisable sans le soutien de pays comme les Etats-Unis, il considère qu’il serait réaliste de taxer les billets d’avion. Cet homme si friand de transparence financière est condamné pour délit d’initié contre la Société Générale en 1988. On l’aura compris, George Soros est l’homme de toutes les bonnes causes mais aussi celui de tous les paradoxes.

Il consacre la moitié de ses revenus aux fondations qu’il a créées. Il a donné à sa principale fondation, l’Open Society Institute, le nom du projet philosophique de son maître, Karl Popper. Parce qu’en plus de tout, George Soros est un penseur. En se fondant sur l’idée de Popper, il veut construire un monde meilleur à travers des sociétés ouvertes dans le monde post-communiste. Ces sociétés seront capables de s’améliorer justement parce qu’elles ont conscience de leurs imperfections. Cette activité nuance l’image de financier sans foi ni loi.

Son programme est éclectique: défense des droits de l’homme, lutte contre la toxico-dépendance, libéralisation de l’information, et parfois controversé : dépénalisation des drogues.
Mais ses préoccupations sont aussi politiques. Il a financé la campagne de Kerry en criant sur tous les toits que l’erreur de Bush est de ne pas reconnaître ses fautes en Irak, « Cette attitude est une garantie de désastre ».
Au sujet du Proche-Orient, il parle d’espoir. Mais pour lui, tant que les investisseurs n’ont pas intérêt à s’installer à Gaza ou en Cisjordanie, il reste beaucoup à faire.

Quand on lui demande d’où vient cette volonté d’aider, il répond sous forme de conte.
C’est en 1979, un jour où il se promenait à Londres, que lui est venu cette révélation. Il a senti son cœur cogner dans sa poitrine et il s’est alors demandé « à quoi tous (ses) efforts pourraient bien servir ». A l’époque, il gère un capital de 100 millions de dollars, et sa fortune personnelle s’élève à 30 millions. Il considère que c’est assez. Il décide d’aider.
C’est à ce moment-là qu’il crée l’Open Society Institute. Son premier projet est la mise en place de bourses universitaires pour les étudiants noirs d’Afrique du Sud.

Très vite, il se tourne vers l’Europe Centrale à laquelle il commence par faire des dons anonymes. Puis, il crée la Fondation Soros en Hongrie, qui sera suivie de 24 autres. Bientôt il ne s’agit plus simplement de distribuer des manuels d’économie de marché aux étudiants hongrois, mais d’investir plus largement en Europe Centrale.
En 1991, quand l’URSS s’effondre, il crée la Fondation internationale pour la science, qu’il dote d’un budget de 100 millions de dollars. Elle accorde des bourses à des universitaires et leur permet d’assister à des congrès à l’étranger. Soros a aussi crée l’Université de l’Europe Centrale qui a deux campus, à Prague et Budapest. Il y a versé 10 millions de dollars pendant 20 ans.

Et il faut comprendre qu’à la différence de self- made men philanthropes comme Ford ou Rockefeller dont l’œuvre humanitaire posthume est surtout destinée à réduire l’impôt successoral, George Soros donne, à l’apogée de sa réussite financière.
Il le souffle parfois, ce qu’il veut, c’est sauver le monde. Mégalomane ? Peut-être un peu. Mais bien moins que d’autres qui ne donnent rien.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Bill Gates avait donc un prédecesseur...

Je ne savais pas... Merci Ornella

Ben.H